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Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/82

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nous conformant à lui ? Quels peuvent être, en effet, les motifs du culte, des hommages, de l’obéissance que l’on nous dit de rendre à l’être suprême, si nous ne les établissons sur sa bonté, sur sa véracité, sur sa justice, en un mot sur des qualités telles que nous pouvons les connoitre ? Comment en avoir des idées claires, si ces qualités en Dieu ne sont plus de la même nature qu’en nous ?

On nous dira, sans doute, qu’il ne peut y avoir de proportions entre le créateur & son ouvrage ; que l’argille n’est point en droit de demander au potier qui l’a façonnée pour quoi m’as-tu formé ainsi ? Mais s’il n’y a point de proportions entre l’ouvrier & son ouvrage ; s’il n’y a point entre eux d’analogie, quels peuvent être les rapports qui subsisteront entre eux ? Si Dieu est incorporel, comment agit-il sur les corps, ou comment des êtres corporels peuvent-ils agir sur lui, l’offenser, troubler son repos, exciter en lui des mouvemens de colère ? Si l’homme n’est rélativement à Dieu qu’un vase d’argille, ce vase ne doit ni prières ni actions de graces à son potier pour la forme qu’il a voulu lui donner. Si ce potier s’irrite contre son vase pour l’avoir mal formé, ou pour l’avoir rendu incapable des usages auxquels il l’avoit destiné, le potier, s’il n’est un insensé, devroit s’en prendre à lui-même des défauts qu’il y trouve ; il peut bien le briser, mais le vase ne pourra l’en empêcher ; il n’aura ni motifs ni moyens pour fléchir sa colère ; il sera forcé de subir son sort, & le potier seroit complétement privé de raison s’il vouloit punir son vase, au lieu de le refaire pour lui donner une forme plus convenable à ses desseins.