Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/99

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rels qui puiſſent remuer nos organes & nous donner des idées ; vérité qui a été aſſez clairement prouvée au commencement de cet ouvrage pour nous empêcher d’y inſiſter davantage. Nous dirons donc ſeulement que ce qui acheve de démontrer que l’idée de Dieu eſt une notion acquiſe, & non une idée innée, c’eſt la nature même de cette notion, qui varie d’un ſiecle à l’autre, d’une contrée à une autre, d’un homme à un autre homme ; que dis-je ! qui n’eſt jamais conſtante dans le même individu. Cette diverſité, cette fluctuation, ces changemens ſucceſſifs ont les vrais caracteres d’une connoiſſance, ou plutôt, d’une erreur acquiſe. D’un autre côté la preuve la plus forte que l’idée de la Divinité n’eſt fondée que ſur une erreur, c’eſt que les hommes ſont peu-à-peu parvenus à perfectionner toutes les ſciences qui avoient pour objet quelque choſe de réel, tandis que la ſcience de Dieu eſt la ſeule qu’ils n’aient jamais perfectionnée ; elle eſt par-tout au même point ; tous les hommes ignorent également quel eſt l’objet qu’ils adorent, & ceux qui s’en ſont le plus ſérieuſement occupés n’ont fait qu’obſcurcir de plus en plus les idées primitives que les mortels s’en étoient formées.

Dès qu’on demande quel eſt le Dieu devant lequel on voit les hommes proſternés, on voit auſſitôt les ſentimens partagés. Pour que leurs opinions fuſſent d’accord il faudroit que des idées, des ſenſations, des perceptions uniformes euſſent par-tout fait naître les opinions ſur la Divinité ; ce qui ſuppoſeroit des organes parfaitement ſemblables, remués ou modifiés par des événemens parfaitement analogues. Or comme cela n’a pu arriver ; comme les hommes, eſſentiellement dif-