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LA MONTAGNE-NOIRE
DARA, le regardant fixement.

À mort ! Non ! Sauve-la, ma mère ! Tu le veux ?

Mirko baisse la tête en signe d’assentiment. — Dara s’avance vers les hommes, et met la main sur l’épaule de Yamina.

Fils ! Elle est mon esclave !

Tous s’écartent.

Fils ! Elle est mon esclave ! En ces monts glorieux,
Elle vivra parmi l’opprobre et la huée !

Yamina tressaille. — Dara se tourne vers elle avec mépris.

Je t’accorde la vie, et tu nous serviras.
Tu porteras les lourds fardeaux. Tu quitteras
Ton impudique voile et ta large ceinture,
Pour nos manteaux de drap et nos robes de bure.

Les femmes s’empressent, prennent les fusils, les réunissent en faisceaux, et portent au fond de grands paniers de terre pour les remparts.

Toi, fille de plaisir des soldats de l’Enfer,
Pour les guerriers du Christ tu fourbiras le fer !

Pendant ces paroles, les femmes ont, pour ainsi dire, illustré ce que dit Dara, en chargeant les fusils, en apportant à boire aux hommes, en nettoyant les handjars.

Mais tu pourras, vivant dans nos pauvres familles,
Voir combattre les fils et travailler les filles,
Et peut-être, en priant la Vierge à deux genoux,
Seras-tu digne un jour d’être l’une de nous.

Elle renvoie, d’un geste méprisant, Yamina, qui courbe la tête et va se mêler aux femmes dans le fond. Toutes apprêtent des tables, des cruches de vin et des coupes. Les hommes s’asseoient, les femmes leur versent à boire.