Page:Homère - Les dix premiers livres de l’Iliade trad. Salel 1545.djvu/323

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Cerches tu point ores quelque Mulet ?
Tes Compaignons t’ont ilz laiſſé ſeulet,
Les cerches tu ? dy moy quelle Fortune
T’ameine icy a ceſte Heure importune ?
Si rien te fault ne le vueilles celer,
Et ne l’approche autrement ſans parler.
    Ô Roy Illuſtre, Ô la Gloire, & Renom
De tous les Grecs, ie ſuis Agamemnon,
Agamemnon Dolent & Malheureux :
Que Iuppiter Cruel & Rigoreux
À tant chargé de Honte & Vitupere,
Qui rien que mal de ma Vie n’eſpere.
Ie viens a toy, pource que ie ne puis
Prendre Repoz en l’eſtat que ie ſuis.
L’extreme Soing, le Soucy nom pareil
Que j’ay des Grecs, m’empeſche le Sommeil.
Et ſuis conduit à telle Honte & Craincte
Que mon Cueur tremble, & mon Ame eſt attaincte
De Deſeſpoir puis les jambes me faillent,
Pour les Doleurs qui mon las Cueur aſſaillent.
À ceſte cauſe, Amy, & que ie voy
Que tu ne dors ainſy non plus que moy,
Ie te ſupply d’adviſer le moyen,
De nous ſaulver de ce Peuple Troien.
Sus, leive toy. Et puis ſi bon te ſemble)
Allons nous en juſques au Guet enſemble,
Afin de voir ſi les Souldards laiſſez
Pour ceſt Effect ſont endormyz, laſſez
Du grand Travail. Las, noz Ennemyz ſont
Bien prés de nous, & ne ſcavons ſ’ilz ont
Quelque vouloir ceſte Nuict : nous ſurprendre,
Sans qu’on ſe puiſſe aulcunement defendre.