Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/281

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Lorsqu’il a soulagé complètement sa faim,
L’excellent serviteur lui tend sa propre tasse,
Pleine de vin ; le roi l’accepte épanoui
Et le flèche à l’instant de ces paroles promptes :
« Ami, quel est ce brave au bien-être inouï
Qui jadis t’acheta, comme tu le racontes,
Et pour l’honneur d’Atride a plus tard expiré ?
Réponds, je l’ai connu peut-être en mes voyages.
Jupiter et sa cour savent si je pourrai
T’en parler sciemment : j’accostai bien des plages. »

Le prince des porchers alors l’apostrophant :
« Ancien, nul chemineux, porteur de ses nouvelles,
Ne persuadera sa femme et son enfant.
Les vagabonds pressés d’emplir leurs escarcelles
Au vrai ne songent guère et mentent d’un beau front.
Sitôt qu’un pérégrin arrive dans Ithaque,
Il va chez ma maîtresse, il débite une craque.
Joyeuse, elle l’accueille et l’interroge à fond ;
Ensuite de gémir, d’humecter ses paupières,
En femme qui lamente un époux au tombeau.
Toi, vieux, tu redirais les fables coutumières,
Si quelqu’un te donnait et tunique et manteau.
Là les chiens, les vautours de sa peau misérable
Ont dépouillé ses os ; son âme l’a quitté ;
Ou les poissons marins l’auront déchiqueté,
Et son squelette gît sous un amas de sable.
C’est ainsi qu’il est mort, plongeant dans le chagrin
Ses amis, moi surtout : en quelque lieu que j’erre,
Je ne retrouverai de meilleur souverain,
Dusse-je revenir chez mon père et ma mère,
Au toit qui m’a vu naître, où leurs soins m’ont nourri.