Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/407

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quand même sur nous deux fondraient cinquante loches
De hardis combattants, prêts à nous juguler,
Leurs bœufs, leurs moutons gras iraient garnir tes broches.
Cède donc au sommeil ; il est dur de veiller
Toute la nuit ; bientôt tu sortiras de honte. »

Elle dit ; et répand le somme sur ses yeux ;
Puis l’alme déité vers l’Olympe remonte,
Dès qu’au gré des pavots le roi dort, oublieux
De ses chagrins. Pourtant son épouse s’éveille
Et se met à pleurer, assise en son doux lit.
Lorsque son œil royal de pleurs se désemplit,
De Diane en ces mots elle attire l’oreille :
« Diane, auguste dive, enfant de Jupiter,
Oh ! perce-moi la gorge avec une sagette,
À l’instant même, ou bien permets qu’une tempête,
M’emportant de son souffle aux routes de l’éther,
Dans l’Océan rapide enfin me précipite !
Les filles de Pandare ont fait ce noir plongeon.
Leurs parents étaient morts ; elles, dans leur donjon,
Orphelines restaient ; mais la tendre Aphrodite
Les nourrit de caillé, de miel pur, de bon vin.
Junon leur octroya, par-dessus toutes dames,
L’éclat, l’honnêteté ; Diane un port divin ;
Et Pallas leur apprit l’art des superbes trames.
Tandis qu’aux pics d’Olympe Aphrodite venait,
Pour que Zeus darde-foudre à ces aimables filles
Fournît de beaux hymens (Zeus sait tout, il connaît
Le bon, le mauvais sort des terrestres familles),
La Harpye enleva leur couple étincelant,
Et sous l’âpre Érinnys les mit en esclavage.
Qu’ainsi l’Olympe altier me traite en mon veuvage,