Page:Hope - L’Étoile des fées, trad. Mallarmé, 1881.djvu/66

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de la Reine, comme c’était la coutume, afin que toutes entendissent bien, et commença ainsi son histoire : « Très-peu de temps après votre départ, ô Fée notre mère, je rendis aussi une visite à Terre-Libre accompagnée de mes sœurs Tempérance et Espoir, car nous avions ouï parler de la façon dont, en ce pays, on abuse de la liberté, et dire combien la pauvreté et la misère y abondaient, en dépit de sa richesse et malgré son antique prospérité. Nous descendîmes dans un des districts les plus pauvres de Grandum, la capitale, à l’instant où l’aube grise commençait à poindre sur une journée d’un froid piquant ; et nous entrâmes dans un des greniers d’une haute maison rachitique.

« Le papier pendait en lambeaux le long des murs, humides d’un suintement qui dégouttait jusqu’en bas, lentement, des fentes du toit. Le plancher nu montrait maints trous suspects, pareils à ceux que font les rats, en rongeant. Un peu de paille pour tout ameublement de la chambre ; et dessus gisait une pauvre femme avec son enfant nouveau-né, le front appuyé sur le bras de son mari, un grand gaillard d’aspect musculeux, avec l’air d’un paysan plutôt que d’un Grandumite. Ses traits étaient forts et hagards ; ses yeux, très-enfoncés, avaient pu sembler honnêtes autrefois,