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Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 4.djvu/102

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Si de ta fermeté j'ai plaint l'illusion,

Elle a pourtant saisi mon admiration.

Je n'ai pu sous le fer voir tomber l'espérance

Du destin glorieux que promet ta constance. [425]

Et plein de cet espoir qu'il faut justifier,

Ton prince à ses faveurs veut bien t'associer.

Quand je fais tant pour toi, songe à me satisfaire ;

Et pour des biens certains immole une chimère.

Misaël

De ces bontés, Seigneur, moins flatté que surpris, [430]

Je pourrais les payer par de nouveaux mépris

Si vous m'avez cru ferme, avez-vous donc pu croire

Que tant de cruauté sortît de ma mémoire ?

Après mes frères morts, pensiez-vous que mon coeur

Pût à votre pitié se prêter sans horreur ? [435]

Je m'y prête pourtant, si je le puis sans crime.

Je saurai m'imposer un oubli magnanime.

Ce sacrifice affreux que j'ai frémi de voir

Dans mon âme n'a point porté le désespoir.

Ne vous figurez pas que regrettant leur vie, [440]

Je brûle de venger un trépas que j'envie.

Mes frères sont heureux ; et c'est à vous, Seigneur,

Qu'ils doivent maintenant leur gloire et leur bonheur

Mais ce qui seul en vous doit exciter ma haine,

C'est contre l'Éternel cette audace inhumaine, [445]

Qui par l'impiété signale chaque instant,

Et s'obstine à vous perdre en le persécutant.

Antiochus

Oublie un dieu sans force, un dieu qui t'abandonne,

Et satisfais un roi qui sauve et qui pardonne.

Songez-y, Misaël. Sans m'offenser toujours, [450]

Tu peux à mes bontés laisser un libre cours.