Qu'en vous donnant ma main, prévoyait ma tendresse. [175]
Le roi vient d'arrêter l'hymen de la princesse :
Il va vous demander pour elle cette foi,
Qui n'est plus au pouvoir ni de vous ni de moi.
Pour comble de malheur la Reine me soupçonne.
Si vous voyez la rage où son coeur s'abandonne [180]
Et tout l'emportement de ce courroux affreux
Qu'elle voue à l'objet honoré de vos feux...
Eh ! Jusqu'où n'ira point cette fureur jalouse,
Si, cherchant une amante, elle trouve une épouse ;
Et qu'elle perde enfin l'espoir de m'en punir, [185]
Que par la seule mort qui peut nous désunir !
Calmez-vous chère Inès ; votre frayeur m'offense.
Eh ! De qui pouvez-vous redouter la vengeance,
Quand le soin de vos jours est commis à ma foi ?
Ah ! Prince, pensez-vous que je craigne pour moi ? [190]
Jugez mieux des terreurs dont je me sens saisie :
Je crains cet intérêt dont vous touche ma vie.
Je sais ce que ma mort vous coûterait de pleurs ;
Et ne crains mes dangers, que comme vos malheurs.
Vous le savez : l'espoir d'être un jour couronnée, [195]
Ne m'a point fait chercher votre auguste hyménée ;
Et quand j'ai violé la loi de cet état,
Qui traite un tel hymen de rebelle attentat :
Vous savez que pour vous, me chargeant de ce crime,
De vos seuls intérêts je me fis la victime. [200]
Cent fois dans vos transports, et le fer à la main,
Je vous ai vu tout prêt à vous percer le sein ;