ACTE III
Scène I
Oui ; qu'elle vienne, avant que mon coeur s'abandonne
Aux conseils violents que le courroux lui donne.
Il faut de la prudence empruntant le secours, [545]
D'un trouble encor naissant interrompre le cours.
Voyons Inès ; suivons ce que le ciel m'inspire ;
Dans le fond de son coeur je me promets de lire.
Madame, je l'attends, qu'on la fasse venir ;
Je vais voir si je dois pardonner ou punir. [550]
Eh ! Peut-elle, Seigneur, n'être pas criminelle ?
L'amour seul qu'elle inspire est un crime pour elle :
Mais elle ne s'est pas bornée à le souffrir ;
Soigneuse de l'accroître, ardente à le nourrir,
Et plus superbe encor par l'hymen qu'elle arrête, [555]
Elle s'est tout permis, pour garder sa conquête.
Un des siens me le vient d'avoüer à regret :
Tous les jours auprès d'elle introduit en secret,
Le prince ne suivant qu'un fol amour pour guide,
Va de ses entretiens goûter l'appas perfide. [560]
Sans doute à la révolte elle ose l'enhardir.