Aller au contenu

Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 4.djvu/371

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Au seul danger d'Inès il donne son secours.

Amant désespéré plutôt que fils rebelle, [935]

Mérite-t-il la mort d'avoir tremblé pour elle !

Daignez lui rendre Inès ; vous retrouvez un fils,

Touché de vos bontés, et d'autant plus soumis.

Je dirai plus encor : s'il le faut, qu'il l'épouse.

Ce mot sort à regret d'une bouche jalouse ; [940]

Mais dussai-je en mourir, sauvez votre soutien ;

Sa vie est tout, Seigneur, et la mienne n'est rien.

Alphonse

Je reconnais mon sang. Cet effort magnanime,

Même, en vous abusant, est bien digne d'estime.

Votre coeur à sa gloire immole son repos ; [945]

Et vous prononcez moins en juge qu'en héros.

Mais écoutons Henrique.

Henrique

Hélas ! Que puis-je dire ?

Dans le trouble où je suis, à peine je respire.

Oui, seigneur ; et vos yeux, s'ils voyaient mes douleurs,

Entre Dom Pedre et moi partageraient leurs pleurs. [950]

Dans le dernier combat il m'a sauvé la vie ;

Par le fer africain elle m'était ravie,

Si ce généreux prince, ardent à mon secours,

Au coup prêt à tomber n'eût dérobé mes jours.

C'est donc pour le juger que son bras me délivre ! [955]

À mon libérateur, ciel pourrais-je survivre !

Plus qu'à son père même il m'est cher aujourd'hui ;

Il tient de vous la vie, et je la tiens de lui.

Je sais pourtant, Seigneur, que la reconnaissance

Du devoir d'un sujet jamais ne nous dispense. [960]

Ce sacré tribunal ne m'offre que mon roi ;

Et je ne vois ici que ce que je vous dois.