Aller au contenu

Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 4.djvu/384

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Tous deux à votre trône ont des droits solennels. [1205]

Embrassez, mes enfants, ces genoux paternels.

D'un oeil compatissant, regardez l'un et l'autre ;

N'y voyez point mon sang, n'y voyez que le vôtre.

Pourriez-vous refuser à leurs pleurs, à leurs cris

La grâce d'un héros, leur père et votre fils. [1210]

Puisque la loi trahie, exige une victime,

Mon sang est prêt, Seigneur, pour expier mon crime.

Épuisez sur moi seule un sévère courroux ;

Mais cachez quelque temps mon sort à mon époux ;

Il mourrait de douleur ; et je me flatte encore, [1215]

De mériter de vous ce secret que j'implore.

Alphonse, au garde.

Allez chercher mon fils. Qu'il sache qu'aujourd'hui

Son père lui fait grâce, et qu'Inès est à lui.

Inès

Juste ciel ! Quel bonheur succède à ma misère ?

Mon juge en un instant est devenu mon père ! [1220]

Qui l'eût jamais pensé, qu'à vos genoux, Seigneur,

Je mourrais de ma joie, et non de ma douleur !

Alphonse

Ma fille, levez-vous. Ces enfants que j'embrasse

Me font déjà goûter les fruits de votre grâce :

Ils me font trop sentir que le sang a des droits [1225]

Plus forts que les serments, plus puissants que les lois.

Jouissez désormais de toute ma tendresse.

Aimez toujours ce fils que mon amour vous laisse.

Inès

Quel trouble ! Que deviens-je ! Et qu'est-ce que je sens ?

Des plus vives douleurs quels accès menaçants ! [1230]

Mon sang s'est tout à coup enflammé dans mes veines.