Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 9.djvu/128

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Vous avez vû quelle manœuvre
Gouverne les vents et les flots ;
Pour notre apprentissage essayons ce chef-d’œuvre ;
Je serai le pilote, et vous les matelots.
Vivent les bons conseils, s’écria l’assemblée ;
Partons ; liberté, liberté !
On démare aussi-tôt ; la voile est étalée :
Et voilà par les vents le navire emporté.
Tout alloit bien d’abord ; plus d’un zéphir les pousse ;
Vous eussiez vû maint petit mousse
Courant de vergue en vergue, et grimpant sur les mats ;
Tandis qu’au gouvernail le vieux singe se place,
D’un pilote inquiet affectant la grimace :
On l’eût pris pour Tiphis à son grave embarras.
Messieurs, leur disoit-il, l’orage nous menace ;
Je vois un nuage là-bas ;
Déja des mers se ride et se noircit la face ;
Nous aurons du gros tems ; mais ne le craignez pas.
Il disoit vrai quant à l’orage ;
Quant à son art, c’étoit un autre cas.
Les vents dans le moment déployerent leur rage ;
De foudres redoublés un horrible fracas
Allarme le pauvre équipage,
Qui se voit à toute heure à deux doigts du trépas.