Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 9.djvu/373

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LA JUSTICE ET L’INTEREST

C’est moi seul qui regis le monde,
Dit à dame justice, un jour sire intérêt ;
N’y fais-je donc rien s’il vous plaît ?
Dit justice ; et sur quoi se fonde
Ce grand titre de souverain,
D’unique roi du genre humain ?
Vous avez pour cela de plaisantes maximes,
À votre sens chacun a droit sur tout ;
Ni devoirs, ni vertus, ni crimes,
Il n’est point de projets qui ne soient légitimes
Pourvû que l’on en vienne à bout.
Fort bien, dit intérêt, vous sçavez mon systême ;
Chacun a droit sur tout ; mais pour regler ces droits,
J’ai dicté, j’ai gravé des loix.
Qui les fait observer ? Dit justice : moi-même,
Repartit intérêt. On se passe de vous ;
Je fais agir la crainte, excellente maîtresse ;
Les hommes ne sont pas si fous
D’enfraindre la loi vengeresse ;