Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 9.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’il voulut permettre
À quelques-uns des dieux d’y mettre.
Bien-tôt la lotterie est pleine ; il faut tirer.
Tous les billets sont jettés dans une urne,
Broüillés et rebroüillés. Puis, le fils de Saturne,
C’est donc au sort à se montrer,
Dit-il ; je veux que ce soit lui qui tire ;
Aveugle il est hors de soupçon.
Le sort tire en effet. Mercure a soin d’écrire
À chaque fois et le lot et le nom.
De l’urne à millions sortent les espérances ;
C’étoit toujours cela. Puis de meilleures chances
Faisoient paroître quelquefois
Des amans fortunés, des riches, et des rois.
Le gros lot vient enfin : on nomme la sagesse.
Pour qui ? Numero tant, et Minerve pour nom.
Soudain entre les dieux fanfares, allégresse ;
Chez l’homme au contraire tristesse,
Murmure, injurieux soupçon.
Que voilà bien un trait de pere de famille !
Dit tout le genre humain fâché.
Jupiter fait tomber le gros lot à sa fille !
Bon, cela saute aux yeux, Jupiter a triché.
Pour punir et calmer cette insolence impie,
Quel moyen croyez-vous que Jupin inventa ?
Au lieu de la sagesse, il donna la folie
À l’homme qui s’en contenta.
On ne se plaignit plus, et depuis ce partage
Le plus fou se crut le plus sage.