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LE MANOIR

à votre santé ? Et pour qui est donc réservé ce précieux cordial ?

— Pour le diable qui l’a composé, s’écria Cambrai en quittant l’appartement tout décontenancé.

Louise regarda Mme Hocquart et fondit en larmes.

— Ne pleure pas sur moi, ma bonne Louise, dit celle-ci avec douceur.

— Oh ! madame, c’est sur ce malheureux que je pleure. Ce n’est pas sur les innocents que l’on doit pleurer, mais sur ceux qui sont déshonorés devant les hommes et condamnés par Dieu. Mais attendez-moi, madame, je vais tenter de vous ouvrir une voie de salut. Dieu ne vous abandonnera pas. Il y a un moyen d’échapper. J’ai prié toute la nuit pour être éclairée ; car j’étais indécise entre l’obéissance que je dois à ce malheureux et mon dévouement pour vous. Dieu m’a éclairée, je ne dois pas fermer la porte de salut qu’il vous ouvre. Attendez-moi je ne serai pas lente à revenir.

Elle sortit pour aller à quelque distance du village, chez un brave cultivateur, M. Desclos, où Taillefer se tenait caché.

Cambrai rentra dans le laboratoire. Deschesnaux lui demanda :

— L’oiseau a-t-il bu ?

— Non, et ce ne sera pas moi qui lui présenterai encore le poison : je ne veux pas commettre un crime devant ma fille.

— Lâche imbécile ! reprit Deschesnaux, ne t’a-t-on pas dit qu’il n’était question, dans cette affaire, que d’une légère indisposition, et non d’un crime, comme tu l’appelles avec ta voix tremblante ?

— Je jure, ajouta Théodorus, que l’élixir contenu dans ce flacon ne saurait porter atteinte à la vie. Je le jure par l’immortelle et indestructible quintessence de l’or qui se trouve dans toutes les substances de la nature, et