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À la porte de l’Oule, le poste de garde nationale laissa passer les fugitifs que pourchassait la foule hurlante ; mais à quelque cent mètres sur la route, resserrée là entre le Rhône et les remparts, une quinzaine d’hommes armés, qui étaient sortis de la ville par une autre porte, se jetèrent à la tête des chevaux en criant : « À mort ! Au Rhône ! À mort l’assassin ! » Averti par un des aides de camp de Brune, le préfet accourut avec plusieurs fonctionnaires, quelques gardes nationaux et le capitaine Verger qui rapportait enfin les passeports. Leurs remontrances, leurs prières, leurs menaces ne firent rien. Comment raisonner la soif du sang ? Des pierres furent lancées contre les voitures. Un portefaix, la chemise entr’ouverte, les manches retroussées, saisit le fusil d’un garde national en criant : « — Donne, donne, que je le tue ! »

Éperdus, le préfet et le capitaine Verger prirent le parti absurde de ramener Brune à Avignon. C’était une inspiration de folie. Sur la route, où il y avait tout au plus quarante personnes, quelque incident, quelque hasard, quelque acte énergique pouvaient encore sauver le maréchal ; dans la ville, au cœur même de l’émeute, il était perdu. Brune gardait son