Page:Houssaye - La Terreur blanche en 1815, paru dans Le Temps, 2, 7 et 9 février 1905.djvu/30

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mais l’arme fait long feu. « — Moi, je ne le manquerai pas ! » dit Guindon, qui s’est glissé derrière Brune. Il l’ajuste vivement avec sa carabine. La balle entre par la nuque et ressort par la partie antérieure du cou. Brune tombe foudroyé.

Après ce bel exploit, Guindon accourut triomphant au balcon et dit : « — A quos fa ! (La chose est faite !) ». La foule s’arrêta de hurler à la mort pour crier « Bravo ! » Le major Lambot redescendit sur la place. « — Braves Avignonnais, dit-il, cet homme-là s’est rendu justice à lui-même. Il est mort ! N’imitez pas les cannibales de la Révolution. Retirez-vous ! » On dressa sur l’heure un procès-verbal de suicide que signèrent des témoins complaisants ou terrorisés ; puis, la populace menaçant d’entrer de vive force dans l’hôtel pour s’assurer s’il était bien vrai que Brune fût mort, on se hâta de sortir le cadavre. Des fossoyeurs le mirent dans un pauvre cercueil dont on ne leur laissa même pas le temps de clouer la planche supérieure, et s’acheminèrent vers le cimetière. La foule suivait comme une troupe d’hyènes. Quelqu’un cria : « — Il n’est pas digne d’être enterré ! » Cette parole aiguillonna les instincts féroces de la multitude. On se rua contre les porteurs. Le cadavre de Brune, arraché de la bière,