Page:Houssaye - Souvenirs de jeunesse, 1830-1850.djvu/203

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» Sans le savoir, j’aimais déjà Fantasio arrivé tout rayonnant de sa province, un volume de poésies sous le bras, volume tout imprégné du parfum sauvage de ses bois, cherchant la célébrité, absolument comme s’il n’avait pas eu dans ses armes le blason d’une très vieille famille. Car il avait la race, ce blond Fantasio, la race qui lui faisait la main plus petite, le pied mieux cambré, le sang plus bleu, courant à fleur de peau, sous l’épiderme satiné d’une joue très pâle autour de laquelle frissonnait l’or d’une barbe vaporeuse, enveloppant la bouche de spiritualité. Le nez à courbure d’aiglon, aux minces et frémissantes ailes, aspirait voluptueusement les parfums terrestres, trahissait son impérieuse volonté.

» Dans l’azur de l’œil, il y avait l’attraction des lacs mystérieux où venaient s’abîmer, un beau jour de folie, toutes les suprêmes résistances. Grand, mince, fier, l’attitude en lui serait vite devenue altière, si l’air de tête ne