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POINTE-AUX-ANGLAIS — ÎLE-AUX-ŒUFS, ETC.

une grande barque portant pavillon anglais à la poupe. Nous prenons place sur l’embarcation, qui nous dépose bientôt à terre, au bruit de la fusillade, au son de la cloche de la chapelle. Après une messe basse célébrée par M. l’abbé Lemay, qui nous a accompagnés ici, Monseigneur ouvre immédiatement les exercices de la retraite.

* * *

Nous avions averti qu’on nous réexpédiât ici notre courrier. Il me tardait bien de le voir arriver. Car depuis notre départ, nous n’avions reçu absolument aucunes nouvelles du reste de l’univers, à part quelques télégrammes de Chicoutimi, où il était surtout question d’affaires. — Comme tout est relatif en fait de bonheur ! Dans les villes, il y aurait belle tempête, si l’un des facteurs omettait seulement l’une des distributions postales de chaque jour. Au Saguenay, nous nous sommes vus réduits, durant quelques semaines de l’un des hivers derniers, à deux courriers par semaine, au lieu du service quotidien auquel nous sommes habitués ; et les plaintes étaient générales. Ici, sur la Côte, durant l’hiver, la poste ne vient qu’à peine une fois par mois ; et même, dans la partie orientale du Labrador, au-dessous de Natashquan, on ne reçoit que quatre courriers par hiver. Cependant, on ne s’y trouve pas trop malheureux de ne pouvoir suivre beaucoup les savantes et habiles polémiques des journaux quotidiens de Québec, de Montréal et d’ailleurs. L’été, sur toute la Côte jusqu’à Natashquan, on a le courrier postal toutes les deux semaines, et l’on estime que l’on est alors dans une position bien avantageuse ! Pour moi, je n’ai pas trouvé que ce fût si agréable, et je comptais les jours, depuis quelque temps.

Je ne fus donc pas lent à courir au bureau de poste des Sept-Isles, ce matin. Le partage des choses postales n’était pas encore terminé, et je trouvai le jeune homme qui y procédait plongé dans la stupéfaction la plus intense. Il n’avait jamais