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Page:Huard - Labrador et Anticosti, 1897.djvu/146

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LABRADOR ET ANTICOSTI

nouveau chaque printemps. On teint de même chaque année les rets à hareng et à saumon. Ce qui distingue la seine, c’est sa longueur constante ou à peu près de trente brasses et ses mailles beaucoup plus étroites. Pour seiner la bouette, un homme tient à terre, ou bien l’on attache au rivage, une corde de vingt brasses qui est fixée à une extrémité de la seine ; puis un autre homme, tenant le bout d’une corde semblable attachée à l’autre extrémité de la seine, part en canot et déploie la seine en décrivant un mouvement circulaire ; il revient ainsi au rivage près du point de départ et l’on retire alors la seine à terre. Le petit poisson ramené par le filet a peur d’abord de cet obstacle dont il se tient aussi éloigné que possible : et c’est pourquoi les mailles des deux extrémités du filet peuvent être assez larges, les prisonniers ne tentant même pas de passer à travers ; mais peu à peu, à mesure que les côtés de la seine se rapprochent, les petits poissons se trouvent acculés au centre de la machine, et s’échapperaient alors volontiers (il fallait plus tôt vous sauver, petits ! l’occasion une fois perdue ne revient pas toujours), si les mailles n’étaient là trop serrées pour leur livrer passage. — Voilà la provision de bouette amassée pour la prochaine pêche.

Les rets sont des filets de longueur plus ou moins considérable, et dont les mailles, moyennes pour le hareng, larges pour le saumon, ont les mêmes dimensions dans toute l’étendue du filet. De petits barils hermétiquement clos et des flotteurs en liège maintiennent l’un des côtés au ras de l’eau, tandis que des poids en métal fixés à l’autre côté assurent la position verticale de l’appareil. Le poisson tente de traverser cet obstacle qu’il trouve sur sa route, et s’engage la tête dans les mailles que son corps plus gros ne peut traverser ; il voudrait bien alors se dégager, mais ses ouïes forment crochet et empêchent qu’il ne recule ; suspendu de la sorte, il se noie bientôt. S’il s’agit du saumon, il faut venir assez souvent visiter les rets ; car le poisson pourrait se détacher par hasard, ou encore s’il passait un phoque dans les alentours, il ne se gênerait guère de déjeuner aux dépens du propriétaire de la tenture, comme on dit ici.