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POINTE-AUX-ESQUIMAUX

même, cet essai avait absorbé une partie des fonds que le comte Baillairgé lui avait confiés.

Mais un autre obstacle se dressait aussi devant lui. Il constatait que la Préfecture ne lui fournirait pas les vocations ecclésiastiques sur lesquelles il fallait compter. On ne rencontrait pas sur la Côte Nord cette belle formation de l’enfance que l’on remarque dans nos anciennes paroisses, où la vue fréquente du prêtre et l’assistance régulière aux offices de l’église établissent comme une atmosphère religieuse très propre au développement des germes précieux de la vocation sacerdotale. Il fallait d’abord répandre au Labrador la pieuse éducation de nos familles canadiennes. En définitive, il était nécessaire avant tout de former de bonnes mères de famille. Là était le sûr moyen de préparer l’avenir.

Ce qu’on avait pris pour le commencement ne l’était donc pas. Ce n’était donc pas par la fondation d’un collège que l’on devait, au Labrador, jeter les bases d’un nouvel état social. Ce qu’il y avait de plus urgent, au Labrador, c’était un couvent !

D’autant plus que, s’il était difficile de recruter du dehors des missionnaires, il l’était encore plus de trouver des institutrices en nombre suffisant, qui consentissent à aller se dévouer — si loin ! — à l’éducation des enfants. Il fallait pourtant des écoles dans tous ces petits hameaux disséminés sur une côte de 250 lieues de longueur. Eh bien, un couvent formerait de bonnes institutrices ; le couvent et les bonnes institutrices formeraient de bonnes mères de famille.

Mgr  Bossé remit donc à plus tard l’organisation du petit séminaire de la Pointe-aux-Esquimaux, et s’occupa sans délai de jeter les bases du Couvent de Saint-Joseph du Labrador. Ce n’était pas pour rien qu’on mettait la nouvelle institution sous le patronage de saint Joseph. L’entreprise s’annonçait en effet comme entourée de toutes sortes d’obstacles, et il importait d’avoir un protecteur bien puissant. Disons tout de suite qu’en effet le glorieux saint Joseph se mêla beaucoup de l’affaire et la fit pleinement réussir.