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Page:Huard - Labrador et Anticosti, 1897.djvu/426

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LABRADOR ET ANTICOSTI

rester sur cette côte désolée, obligés tous les ans de recourir à la charité des gouvernements pour passer l’hiver ! »

Ce langage est aussi juste que si l’on disait de la province de Québec qu’elle est incapable de nourrir ses habitants, parce qu’une gelée précoce a détruit la récolte dans tel canton du nord.

Sans doute, la pêche n’est pas tous les ans également fructueuse. Et même, certaines années, elle est très peu productive. — Mais n’arrive-t-il pas, de temps en temps, qu’une sécheresse trop prolongée ou des pluies trop fréquentes diminuent de moitié le rendement des terres, dans toutes nos campagnes ?

Sans doute, encore, il a fallu parfois venir au secours des habitants de quelques localités de la Côte, surtout dans l’est, à cause de certaines conditions plus défavorables dans lesquelles ils se sont trouvés. — Mais il n’y a pas beaucoup de parties de la Province, je crois, où il n’a pas fallu parfois secourir la population éprouvée par un fléau quelconque.

La plupart des localités de la Côte Nord n’ont jamais eu à faire appel à de tels secours.

Mais surtout, il faudrait savoir que le nom de Labrador s’applique à une immense étendue de côtes. On peut dire que ce territoire commence à cinq ou six cents milles en deçà du détroit de Belle-Isle et s’étend encore, en dehors du détroit, le long de l’Atlantique. Assez souvent, dans ces cris de détresse dont on se fait l’écho, il s’agit d’un endroit voisin du détroit, dans le golfe ou au delà, appartenant même à la colonie de Terre-Neuve, et où la pêche est absolument la seule ressource des habitants. Et, dans l’ignorance où l’on est de la position géographique du lieu d’où l’on crie famine, on ne manque pas de croire et de dire qu’au Labrador — et par là on entend toute la côte du golfe Saint-Laurent — il n’est guère possible de trouver des moyens de subsistance, et que les gens qui l’habitent devraient bien le quitter pour aller gagner plus sûrement leur vie en d’autres régions.

La vérité, et je crois l’avoir assez démontrée, c’est que généralement la Côte Nord fait vivre ses habitants.