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Page:Huard - Labrador et Anticosti, 1897.djvu/455

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TOPOGRAPHIE DU LABRADOR ORIENTAL

« Quand la colonie de la Nouvelle-France eut commencé à s’affermir, des compagnies, à la tête desquelles étaient les sieurs Aubert de la Chesnaye et Riverin, obtinrent des concessions de terres sur la côte du Labrador, au nord de Blanc-Sablon. Peu de temps après, le sieur LeGardeur de Courternanche[1] était mis en possession de la baie de Phélypeaux, aujourd’hui nommée la baie de Brador[2], et le sieur Amador Godefroy de Saint-Paul

    qu’a été cet Old Fort. On croit qu’il est appelé old, parce que Jacques Cartier s’y serait fortifié lors de son hivernement en 1534, et que personne n’aurait gardé ce fort après son départ. Ceux de cette opinion disent qu’on ne voit aucune trace de fortification, aucune trace de cimetière. Mais d’autres disent qu’ils ont connu un vieux cimetière, de vieilles redoutes en terre. Dans tous les cas, l’on trouve au Vieux-Fort des débris de maisons françaises, débris qui consistent, comme en tous lieux où ont passé les Français, en « solages » et grandes cheminées en pierre, en débris de tuiles… J’ai vu des restes de maisons françaises au poste de la Tabatière, à Kikapoué (?), à Shécatica. » Au lecteur de conclure ce qu’il voudra de tous ces témoignages. — On trouve, au Labrador terre-neuvien, les vestiges d’un autre fort, vis-à-vis l’îlot de Belle-Isle, qui est situé en dehors du détroit de même nom. En effet, dans la baie des Châteaux, sur un promontoire appelé Pointe de Grenville, on voit encore les ruines d’une forteresse, dont M. P. Vigneau (l’annaliste acadien que j’ai si souvent cité) a relevé le plan en 1868. Ce fort a 77 pieds de côté ; l’épaisseur de ses murs est de trois pieds. On y reconnaît la poudrière, les fossés, les bastions. M. l’abbé H.-R. Casgrain a publié un article, concernant les ruines de cette forteresse, dans l’Opinion publique (Montréal) du 18 mai 1876, en y joignant la gravure de ce plan dont M. Vigneau m’a raconté l’histoire comme suit, dans la lettre même que j’ai mentionnée ci-dessus. « J’ai pris le plan de cette forteresse le dimanche 13 septembre 1868, comme mon livre de cette année-là, à bord de la Wide-Awake, en fait foi. Et je vous dirai de plus que j’en ai levé le plan sur un morceau de papier-carton que j’arrachai de dessous la doublure de mon casque. Lorsque M. Auger, missionnaire de Natashquan, quitta la Côte, l’année suivante, je crois, il manifesta un si grand désir de l’avoir que je lui en fis cadeau pour avoir la paix. À son arrivée à Québec, il le déposa à l’université Laval, aux soins de feu M. Laverdière, alors professeur d’histoire. C’est là que le révérend M. Casgrain l’a trouvé, lequel a eu la complaisance de le publier sur l’Opinion publique. Il me fit l’honneur de m’en envoyer une copie, que je reçus par l’entremise de M. David Têtu. » (A.)

  1. Les Courtemanche ont possédé la seigneurie de Brador durant trois générations. Elle fut ensuite cédée à un conseiller de Québec qui, lors de la cession du Canada à l’Angleterre, la vendit à Alexandre Grant. Celui-ci la vendit, à son tour, à M. Lymburner (dont parle M. Ferland un peu plus loin), qui établit la Labrador Company. En 1820, Samuel Robertson acheta le tout pour la somme de 120 livres. (A.)
  2. Cette baie de Brador, qui se trouve à l’ouest de Blanc-Sablon et près de la limite orientale de la province de Québec, porta successivement les noms de baie des Esquimaux, baie Phélypeaux et baie des Espagnols. D’après un récit de voyage remontant à l’année 1704, « A cette époque on voyait encore dans cette baie les ruines d’un établissement de pêche des Espagnols », dit l’honorable juge A.-B. Routhier (Sa Majesté vs Dennistonn et al.), Rapports judiciaires de Québec, vol. XV, p. 381. (A.)