hommes pour en tirer bon parti. Le propriétaire du filet fournit le sel pour le poisson, et supporte seul les frais de réparation ; mais il prend à lui seul la moitié des profits réalisés. C’est surtout depuis les îles Sainte-Marie jusqu’au Blanc-Sablon, c’est-à-dire dans un parcours de 40 lieues, que l’on emploie les trap-nets. Il paraît que, dans les dernières années, on a vu jusqu’à 300 navires de Terre-Neuviens venir, durant le mois de juillet, tendre des trap-nets près de la côte. — La morue vient ainsi près de terre, à cette époque, parce que le capelan dont elle se nourrit se trouve alors le long du rivage.
On devine aisément que l’usage de ces trap-nets ne fait pas l’affaire de nos pauvres pêcheurs du Labrador. D’abord, ces machines coûtent cher, et il serait bien au-dessus de leurs moyens d’en faire l’acquisition. Quand on pense que, de Natashquan à Blanc-Sablon, il n’y a, parmi les pêcheurs, qu’un seul propriétaire de goélette, habitant de la Romaine ! Ensuite, et surtout, l’usage du trap-net, tel qu’il est pratiqué, fait un tort considérable aux pêcheurs à l’hameçon ; car dans les environs de l’un de ces engins, la morue ne mord pas à la ligne. Or, comme on a bien soin de placer ces sortes de filets dans les endroits les plus fréquentés par le poisson, il en résulte que ces bonnes places de pêche se trouvent enlevées à nos pêcheurs, qui doivent se contenter des postes de deuxième ordre.
Mais ce n’est pas seulement à la petite pêche à la morue, celle qui fait vivre la population du bas Labrador, que l’usage des trap-nets fait le plus grand tort. La prise du saumon devient de plus en plus faible, depuis que l’on a tendu partout ces sortes de filets dont les mailles trop étroites retiennent ce poisson avec la morue. « C’est ainsi, m’écrit un missionnaire, que la rivière Saint-Paul, à l’embouchure de laquelle on s’est servi de trap-nets, n’a donné en 1894 que 30 barils de saumon ; en 1895, 7 barils ; et, en 1896, 9 barils. Autrefois, cette rivière donnait jusqu’à 120 barils. »
Mais le trap-net ne suffit pas aux gens de Terre-Neuve pour ravager nos pêcheries. Ils ont encore un autre engin que l’on