Je ramasse donc le bâton et le lance assez loin. Le chien, l’œil brillant de plaisir, s’élance aussitôt et me le rapporte. Nous répétons plusieurs fois l’exercice. J’aurais volontiers discontinué la partie, au bout de quelques instants ; mais allez donc mécontenter un compagnon qui a, pour appuyer son sentiment, les mâchoires pourvues d’une armure offensive et défensive aussi formidable ! L’amitié des puissants est bien incommode ! Donc, nous continuons le jeu du bâton… À la fin, il arriva que mon terre-neuve me rapporta le bâton à demi-rompu, je jugeai que l’occasion était bonne pour me retirer du jeu, et le terre-neuve comprit heureusement que les torts étaient de son côté.
Le petit village de Godbout est bâti au fond d’une baie qui s’étend entre le cap de la Pointe-de-Monts, à l’est, et l’entrée de la rivière Godbout, du côté de l’ouest. Il y a là un ancrage sûr et un port bien protégé, surtout contre les vents d’ouest. Cette rivière, qui n’est pas navigable, prend sa source à 75 milles dans les terres, au lac à Deux-Décharges. Renommée pour la pêche au saumon, elle est la propriété de quelques Montréalais, qui possèdent aussi les terrains avoisinants. Comme on le sait, le gouvernement provincial ne cède plus de la sorte la propriété d’aucune rivière, et loue seulement à l’enchère les cours d’eau où il y a du poisson.
De son côté, le ministère des Pêcheries n’accorde aucun permis de pêche au saumon, dans la mer, près de l’embouchure de cette rivière, afin de mieux conserver sa richesse.
La baie de Godbout est aussi un bon endroit pour la pêche au hareng et la pêche au maquereau. Pour ce qui est de ce dernier poisson, on cite encore, après trente-cinq ans, le beau coup de filet d’un Américain, nommé Watson, qui lui donna plus de mille barils de maquereaux. Mais ce n’est pas tous les jours que se renouvellent de pareils événements.
On emploie de dix à quinze barges pour la pêche.