Page:Hubert, Mauss - Mélanges d’histoire des religions, 1909.djvu/275

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l’idée d’un pouvoir magique qui n’est limité que par lui-même, elle justifie a priori toutes les anomalies possibles. D’autre part, les propriétés qu’on lui connaît permettent d’expliquer analytiquement celles que nous avons dit, au commencement de ce travail, être les propriétés de la notion magico-religieuse du temps. Nous avons vu déjà qu’elles cessaient d’être contradictoires si l’on substituait à la notion d’un temps quantitatif celle d’un temps qualitatif, à plus forte raison si la qualité, dont ce temps est essentiellement susceptible, est d’être sacré. S’agit-il de l’homogénéité qualitative des parties du temps, il n’est pas seulement absurde de supposer que ces parties, étant distinctes, puissent n’être pas, chacune pour soi, qualitativement homogènes, mais encore il est criminel, sacrilège de troubler cette homogénéité sacrée ; c’est le même crime que d’enfreindre un tabou. Les parties symétriques ne sont plus seulement équivalentes en tant que qualitativement semblables, mais, en raison de la facilité avec laquelle le sacré se substantialise en s’objectivant, elles sont réellement et substantiellement identiques. Il est naturel qu’une partie d’une durée puisse être prise pour le tout, non plus seulement parce que la qualité, dont le tout est investi, se retrouve tout entière dans les parties, mais parce que, substantiellement, la qualité de cette durée peut en être détachée et fixée sur sa partie. Enfin, les dates critiques interrompent les durées, d’une part, parce que, étant sacrées, elles sont réellement ce qu’elles sont verbalement, c’est-à-dire séparatrices, et, d’autre part, pour la même raison, elles comportent les inhibitions qu’entraînent avec elles toutes les choses sacrées et dont les interdictions du sabbat sont le type.

La réponse à la question posée en tête de ce travail est que la magie et la religion ont concilié la contradiction flagrante qu’il y a entre la notion de sacré et la notion de temps, aux exigences desquelles elles étaient également soumises, en attribuant conventionnellement au temps et