Page:Hubert - La Torture aux Pays-Bas autrichiens pendant le XVIIIe siècle.djvu/137

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NOTE COMPLÉMENTAIRE.



M. Ad. Prins, au cours du rapport extrêmement bienveillant qu’il a consacré à notre mémoire[1], s’est demandé pourquoi les Cours de justice des Pays-Bas ont poussé si loin la résistance aux innovations.

« M. Hubert, dit-il, se borne à constater le fait. M. E. Poullet en a recherché les causes : il a signalé en premier lieu l’absence de ces hommes de lettres qui, en France, savaient donner à leurs pensées vraies ou erronées une forme entraînante et séductrice qui en décuplait l’influence. Il montre ensuite que notre régime national, bien différent du régime français, n’avait pas suscité les mêmes haines. Les attaques contre l’ensemble des institutions étant beaucoup moindres, les institutions pénales profitaient de cette situation et étaient épargnées plus qu’ailleurs par l’opinion publique.

Peut-être aussi faudrait-il ajouter que les Belges, engourdis par l’atmosphère paisible que leur créait le gouvernement de Charles de Lorraine, avaient de la peine à se mettre en mouvement. Ce n’est pas la seule fois que l’on a vu dans l’histoire le bonheur et la tranquillité matérielle paralyser l’énergie d’un peuple jusqu’au jour où il est entraîné plus loin qu’il ne voudrait. »

L’honorable rapporteur dit vrai. Il y a une lacune dans notre travail. Nous avons exposé les résistances opiniâtres des corps de justice aux réformes équitables et rationnelles proposées par le Gouvernement ; nous n’avons pas fait saisir à nos lecteurs les causes intimes de l’état d’esprit de nos magistrats. La raison de notre silence est que, en dépit d’une étude attentive de la question, nous ne trouvons pas d’explication satisfaisante, car les raisons données par E. Poullet, bien qu’elles contiennent une part de vraisemblance, ne nous ont pas convaincu.

L’éminent historien a remarqué avec raison que Van Espen — il aurait pu dire la même chose de G. de Fierlant — ne sut pas, comme les écrivains fran-

  1. Dans la séance tenue le 9 novembre 1896 par la Classe de lettres de l’Académie royale de Belgique.