Page:Hubert - La Torture aux Pays-Bas autrichiens pendant le XVIIIe siècle.djvu/26

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de sa dite question ; que s’il le révoque, se peut répéter ladite question, si les juges le trouvent ainsi convenir, ou autrement en pourront faire comme de droit et raison appartiendra, se réglant quant à la signature, comme dit est cy-dessus.

« Art. 41. — Que s’il endure ladite question, et ne se peut rien tirer de sa bouche, ne voulons que sans nouveau indice, il puisse estre remis à ladite question : mais audit cas se devra visiter le procès, pour luy faire droit comme la matière le requerra, tant entre nos Fiscaux-officiers, que partie intéressée, soit à l’absolution, élargissement, peines extraordinaires, ou autrement, comme il conviendra.

« Art. 42. — Deffendons bien expressément à tous juges quels qu’ils soient, d’user de la torture ou question extraordinaire, autrement que ez cas où du Droit il est permis[1] ; sçavoir est quand la chose est si claire et la preuve si apparente, qu’il semble ne rester que la confession du prisonnier pour indubitablement le convaincre : mais où il n’y a plaine demye preuve[2], ou bien où la preuve est certaine et indubitable, interdisons d’appliquer ladite question ; abolissons aussi ausdits cas, toutes coutumes, usances, statuts ou observations au contraire, qui sont plutôt

  1. Du Droit il est permis, c’est-à-dire le droit romain. Ce texte est la traduction du 1. I, § 1 De quæstionibus : « Ad tormenta ita demum veniri oportet, cum suspectus est reus, et aliis argumentis ita probationi admovetur, ut sola confessio deesse videatur. » Cette expression probationi admovetur ne signifie en aucune manière preuve complète, outre laquelle l’aveu serait encore nécessaire, mais preuve incomplète, preuve qui rend seulement la culpabilité de l’accusé vraisemblable, au point d’emporter la conviction morale du juge. Il s’agit donc, dans la pensée du législateur, de compléter cette preuve au moyen de la torture. Voir Voorda, De crimineele ordonnantien van Koning Philips van Spanje, p. 370.
  2. Une malheureuse virgule, glissée par erreur dans le texte original, et suivie avec une maladresse étonnante dans la traduction flamande ou hollandaise, fut saisie avec avidité. L’exemplaire authentique, sur lequel fut faite la traduction, avait une virgule entre les mots plaine, demye, et le traducteur mit volle oft halve, plaine ou demye ; dès lors les mots suivants offraient un contre-sens, et dans les éditions postérieures on mit incertaine et douteuse au lieu de certaine et indubitable ; et, d’après cette faute, on appliqua la question dans le cas où la preuve était suffisante pour condamner, contre l’esprit des lois romaines et du législateur. Voir Meyer, Esprit, origine et progrès des institutions judiciaires, t. IV, pp. 293-294.