Aller au contenu

Page:Hubert - Les Îles de la Madeleine et les Madelinots, 1926.djvu/140

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 124 —

et quelques légumes ; on défricha quelques arpents tout en sortant son bois de charpente pour la maison à construire. À l’automne, on s’engagea dans la pêche à l’éperlan avec quelques Anglais de l’endroit ; on réalisa de jolis profits qui permirent de consacrer l’été suivant à la culture. Mais une terrible épreuve vint fondre sur la colonie naissante et ruiner de fond en comble, cet établissement embryonnaire. Un incendie épouvantable ravagea toute la forêt d’alentours, détruisit le bois de charpente rendu sur place, toute la récolte prochaine et plusieurs animaux dont deux énormes cochons gras qui rôtirent dans leur tet (soue) qu’on avait oublié d’ouvrir. Quand on s’en aperçut le rôti était carbonisé. À peine put-on défendre l’habitation contre l’acharnement du feu à tout dévorer sur son passage, même les habits de nos vaillants et indomptables pompiers. Les femmes s’étaient sauvées à travers la rivière à l’Anguille. Résultat : aucune perte de vie humaine, mais un pays rasé, dénudé comme un désert plein de désolation et de deuil. Quel rude coup pour ces pionniers qui ne reçurent aucun secours des pouvoirs publics !

Sans se décourager, ils se remirent quand même à l’œuvre avec une nouvelle énergie. Le bon Dieu ne les abandonna pas dans leur immense malheur, car l’hiver suivant ce fut une pêche miraculeuse qui les aida puissamment à se rebâtir plus confortablement.

Quelques autres familles viennent s’ajouter aux premières ; mais aux Îles, on ne semble pas très enthousiaste pour la Baie-du-Vin : trente-deux familles seulement s’y sont établies jusqu’ici.

Quand les Madelinots abordèrent dans ces parages délaissés du Nouveau-Brunswick, ils trouvèrent parmi les Anglais quelques familles acadiennes, rares débris des anciennes familles qui s’étaient échappées de la vallée d’Annapolis et réfugiées là au temps de la