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Page:Hubert - Les Îles de la Madeleine et les Madelinots, 1926.djvu/222

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lorsqu’il est arrivé quelque accident, le manque de communication a fait endurer de grandes souffrances.

Un gardien de phare est comme les autres mortels : il a besoin parfois de communiquer avec la terre ferme pour ses propres affaires, souvent pour ce qui regarde ses devoirs comme gardien, quelquefois pour protéger sa vie et celle de sa famille. Le 26 juillet 1908, un de mes enfants s’est démis un bras. Si j’avais pu envoyer un message de dix mots sur la terre ferme, au prix de mon année de salaire, je l’aurait fait volontiers. C’est pour cela que tous les gardiens qui se sont succédés jusqu’à moi, après s’être efforcés de démontrer la nécessité d’avoir des communications télégraphiques ici, ont abandonné de dégoût.

Je ne peux comprendre pourquoi ce rocher a tant été systématiquement ignoré, quand tant de stations de marconi ont été établies où il y avait déjà d’autres communications télégraphiques. Et pourtant, par sa situation géographique, cette station ne manque pas d’importance : située sur la route de tous les vaisseaux qui remontent le Saint-Laurent, excepté pendant quelques mois l’été, combien de fois, quoiqu’il soit bien spécifié dans les codes internationaux que cette station n’en est pas une de signaux, ces vaisseaux m’ont demandé avec instances de les rapporter à Québec. L’on me demande des nouvelles du temps dans le Saint-Laurent, et surtout le printemps quand on redoute les glaces, pas un vaisseau ne passe sans me signaler. Sans doute, ces navigateurs ne peuvent se faire à l’idée que ce phare soit laissé ainsi dépourvu de toute communication.[1]

  1. En 1873, M. Faucher de Saint-Maurice pensait que ce rocher était appelé « à rendre, comme observatoire télégraphique, les services les plus signalés. Il accomplira, lui aussi, sa mission dans le rouage universel. Relié par un câble sous-marin au Cap-Breton, au groupe de la Madeleine, au Nouveau-Brunswick, à l’Île du P. É., à la Gaspésie, à l’Anticostie — et plus tard à la côte nord et à Belle-Isle — il annoncera au monde le passage des navires, donnera les nouvelles qui serviront de bases à d’importantes études météorologiques. »