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Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/118

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fixer dans la bonzerie. Les religieux bouddhistes ne se souciant pas des missionnaires catholiques et les missionnaires catholiques ne voulant pas des religieux bouddhistes, l’accord ne pouvait être plus parfait. Il fallut donc céder à des désirs si clairement manifestés de part et d’autre, et le sous-préfet permit au P. Ricci de se rendre à Tchao-Tcheou.

Dès leur arrivée dans cette ville, ils s’empressèrent de rendre visite au gouverneur, qui parut fort étonné que des religieux ne voulussent pas vivre avec des bonzes. Le P. Ricci lui exprima combien il y avait de différence non-seulement entre les croyances des bouddhistes et la foi des chrétiens, mais encore entre leurs livres de prière. Le gouverneur ne comprenant pas ces variétés de culte et protestant qu’il ne pouvait y avoir dans le monde entier une doctrine et une écriture différentes de celle des Chinois, le P. Ricci tira de sa manche un bréviaire et lui dit : Voilà notre loi et nos caractères, voyez… Le magistrat demeura confondu. Le supérieur de la bonzerie de Nan-Hoa, qui avait par honneur accompagné les missionnaires, certifia de son côté que ces étrangers n’étaient pas de la religion des Chinois. Lorsqu’ils ont visité notre temple, dit-il, ils n’ont pas fait le plus petit acte de dévotion ; on ne les a pas même vus se prosterner devant le corps du grand et saint fondateur. D’après tous ces témoignages, il fut permis aux missionnaires de s’établir à Tchao-Tcheou. On leur concéda un beau terrain, dont ils voulurent payer le prix, afin que la propriété en fût mieux assurée, et les travaux de construction furent poussés avec activité. Le P. Ricci se garda bien de faire bâtir comme à Tchao-King une maison en style européen.