Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le zélé missionnaire ne demandait pas mieux. Il fit hommage au vice-roi des ouvrages qu’il avait composés, et voulut aussi lui offrir un tube à verre triangulaire qui décomposait la forme et la couleur des objets qu’on plaçait dedans. Cette espèce de jouet inconnu des Chinois, excitait leur surprise et leur enthousiasme au delà de toute expression. Le vice-roi avait grand désir de le posséder ; cependant, pour faire honneur à sa dignité, il le refusa magnanimement. « Il est écrit dans nos annales, dit-il au P. Ricci, qu’un religieux des temps passés avait une pierre du plus grand prix. Un vertueux personnage alla visiter ce religieux qui lui offrit sa pierre précieuse. Il l’accepta, et la lui ayant aussitôt rendue : — Ce joyau, dit-il, sera toujours en votre possession… car vous ne l’offrirez jamais qu’à un homme de bien, et celui qui voudra être estimé vertueux ne l’acceptera sans doute jamais. Ainsi elle vous restera toujours. — Ceci s’applique à vous et à moi, maître Ly, car nous suivons tous les deux les sentiers de la vertu. » Il faut convenir que ce vertueux vice-roi n’était pas très modeste. Cependant il était réellement bon et généreux. Quoiqu’il eût refusé le petit présent du P. Ricci, il lui accorda franchement sa protection et le traita avec beaucoup de bienveillance. Son exemple fut d’un heureux effet, et les Chinois de qualité s’empressèrent d’aller visiter le missionnaire catholique.

Le peuple et les mandarins de Nan-Tchang-Fou paraissant très-favorables au P. Ricci, celui-ci songea à s’occuper activement de la propagande religieuse. Il écrivit à Macao pour demander un confrère et quelques secours pécuniaires, afin de pourvoir aux frais