Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/150

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mais toujours d’une architecture bizarre et pleine d’originalité. Durant les belles nuits d’été, les riches habitants de Sou-Tcheou ont l’habitude de faire de longues promenades sur leurs magnifiques jonques, où ils étalent tout le luxe de leur brillante parure et la richesse de leurs équipages nautiques. Certains quartiers sont le rendez-vous de la fashion chinoise et comme les Champs Élysées de cette voluptueuse cité. Les habitants du Céleste Empire ont l’habitude de dire : « Les bienheureux ont le paradis dans le ciel ; les hommes ont Sou-Tcheou sur la terre ».

Le docteur Kiu-Taï-Sse engageait vivement le P. Ricci à fonder une mission à Sou-Tcheou. Il tenait beaucoup à ce projet, parce que Sou-Tcheou était sa patrie et qu’il avait là ses parents et ses amis. Il lui semblait d’ailleurs qu’une ville calme et paisible, où l’on ne trouvait guère que des lettrés et des marchands, présentait moins de difficultés que Nanking, avec ses innombrables légions de mandarins civils et militaires, race toujours un peu jalouse et hostile. À cette époque, les six cours souveraines résidaient à Nanking, pendant que l’empereur et la cour habitaient la capitale du nord. Kiu-Taï-Sse prétendait qu’au milieu de ce concours immense de fonctionnaires de tout grade, il serait impossible aux missionnaires d’obtenir la faveur de tous, sans exception, et que l’hostilité d’un seul mandarin suffirait pour les faire chasser tôt ou tard de Nanking. Cependant, avant d’adopter un plan définitif, on voulut attendre quelques jours, afin de bien peser les avantages et les inconvénients qu’il pourrait y avoir de part et d’autre. D’ailleurs, les fêtes du premier de l’an étaient là ; et l’on sait que les Chinois n’ont