Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/156

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dicament salutaire, sans être adouci avec cet apprêt. Or le P. Matthieu Ricci n’a avec aucune autre chose tant rempli d’étonnement toute la troupe des philosophes chinois qu’avec la nouveauté des sciences d’Europe confirmées par des raisons très-solides[1]. »

Le P. Ricci ayant trouvé les Chinois enfoncés dans les erreurs les plus grossières en astronomie, en physique et en géographie, s’était dit qu’en faisant toucher du doigt à ces lettrés orgueilleux les absurdités de leur prétendue science, il lui serait ensuite facile de les amener à conclure qu’en religion ils n’étaient pas plus avancés que dans les sciences naturelles, et qu’ils avaient besoin d’être instruits. Une telle méthode était spécieuse et d’une facile exécution. Les Chinois admettaient que le ciel est rond, mais la terre carrée. Ils expliquaient les éclipses de diverses manières. Les uns prétendaient que la lune étant effrontément fixée par le soleil, se troublait et avait tellement peur qu’elle finissait par devenir ténébreuse. D’autres assuraient qu’il y avait un gros trou au milieu du soleil, et que lorsque la lune se trouvait, à une certaine distance, juste en face de ce trou, elle ne pouvait recevoir les rayons du soleil. Les Tao-Ssé, ou docteurs de la raison, enseignaient tout bonnement qu’il y avait dans les cieux une déesse gigantesque qui n’avait qu’à étendre la main droite pour cacher le soleil, et la gauche pour cacher la lune ; les éclipses n’étaient pas autre chose. Quant aux éléments, ils en admettaient cinq, qui s’engendraient mutuellement les uns les

  1. Trigault, de Exped. christ., lib. IV, p. 304.