Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/210

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roïquement cet horrible supplice, et ne cessa de protester de son innocence.

Le juge était sur le point de le renvoyer absous, lorsque son accusateur, le néophyte apostat, se présenta et dit que Martinez était réellement un dangereux conspirateur ; qu’à son arrivée à Canton il s’était empressé d’acheter de la poudre, et qu’un enfant de la maison où il logeait pouvait en témoigner. Cette nouvelle accusation ranima la colère du magistrat. On fit venir l’enfant et on l’interrogea. Dans la langue chinoise, le même caractère, yo, peut signifier à la fois poudre à canon ou poudre de médecine, il suffit pour exprimer l’un ou l’autre d’une légère différence dans l’intonation. Le juge demande l’enfant ce que Martinez a acheté en arrivant à Canton. Il répond naïvement qu’il a acheté du yo (de la poudre de médecine). Vous l’entendez, s’écrie l’accusateur, il a acheté du yo (de la poudre à canon). Martinez se défend et explique qu’il avait en effet acheté des médicaments pour se délivrer de la fièvre. Le témoin, interrogé de nouveau, confirme ce que vient de dire l’accusé ; mais le juge ayant fait serrer les doigts de l’enfant entre deux bambous et le menaçant des plus cruelles tortures, le força de déclarer que le yo en question était effectivement de la poudre à canon. L’accusé fut alors soumis à une cruelle flagellation et condamné à mort. Avant de subir le dernier supplice, il devait être encore interrogé et torturé par le vice-roi. Mais son corps avait été si impitoyablement déchiré qu’il ne présentait qu’une seule grande plaie tout ensanglantée. Pendant qu’on