Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/84

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lèbre Clavius, il entreprit de faire pour les Chinois une mappemonde, dans laquelle il comptait flatter un peu leur vanité, en plaçant la Chine dans le centre de la carte et en disposant les autres pays autour de l’Empire Céleste[1]. Voici, du reste, de quelle manière le P. Trigault raconte le fait :

« Le Père Ricci, bien versé ez disciplines de mathématique, lesquelles il auoit appris du père Christophe Clauius, docteur et prince des mathématiciens de son siècle qu’il avoit ouy quelques années à Rome, appliqua son esprit à ceste description (mappemonde) qui n’estoit pas malseante à son dessein de prescher l’Évangile, sçachant bien qu’on ne s’est pas tousiours servi d’un mesme moyen, pour, selon la disposition divine, attirer quelque peuple à la foy de Jésus-Christ. En vérité, par ceste amorce, plusieurs entre les Chinois ont été amenez dans la nasse de l’Église. Il estendit donc cette description (mappemonde), en un champ plus ample, à fin qu’il peust aisement contenir les charactères chinois qui sont plus grands que les nostres et adjousta non les mesmes annotations, ains d’autres selon l’humeur des Chinois, et convenables à son intention ; car, où il venoit à propos, en divers lieux, traitant des coustumes et cérémonies de diverses nations, il discouroit des mystères sacrez de nostre très saincte foy, jusqu’au temps présent in-

  1. Pour se conformer encore plus complétement aux idées des Chinois, Ricci, loin de suivre la projection steréographique ordinaire, d’après laquelle la partie centrale est vue plus en petit qu’aucune autre, y représenta au contraire, la Chine plus en grand : Ut Sinœ regnum in medio majorem partem occuparet, reliqua regna in finibus mappœ oriformis exigua apparerent. (Riccioli, Almagest., nov. 1651.)