Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 1.djvu/36

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à camper. Notre premier soin fut de chercher dans ces lieux sauvages un poste convenable, c’est-à-dire un endroit où il y eût du combustible, de l’eau et du pâturage, trois choses essentielles dans un campement. De plus, vu le mauvais renom de la Bonne montagne, nous désirions trouver un site solitaire et isolé. Peu aguerris encore, et tout-à-fait novices dans la vie nomade, la pensée des voleurs nous préoccupait sans cesse. Nous avions toujours peur de camper en vue des passants qui auraient bien pu venir nuitamment nous dévaliser et enlever nos animaux. Un enfoncement entouré de grands arbres fut le lieu que nous adoptâmes. Après avoir fait accroupir nos chameaux et avoir mis bas les charges, nous allâmes essayer de dresser notre tente sur une place bien unie que nous avions remarquée au bord de la forêt impériale, et à côté d’une petite fontaine qui sortait de dessous le tronc d’un pin séculaire. La construction de notre petit palais de toile nous donna du tracas et de la fatigue.

D’abord on s’y prit mal, puis un peu mieux, puis bien,
____Puis enfin il n’y manqua rien.

Après ce premier travail, nous installâmes notre portier. Car nous avons oublié de dire qu’un portier faisait partie de notre caravane. Un gros clou de fer fut enfoncé en terre jusqu’à la tête. La tête du clou était traversée d’un anneau suivi d’une longue chaîne, et au bout de la chaîne était retenu par un collier notre fidèle Arsalan[1], dont l’office était d’aboyer à l’approche des étrangers. Ayant ainsi

  1. Mot tartare-mongol qui signifie lion.