Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 1.djvu/43

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pleurant nous demander l’aumône. On leur a laissé cultiver, par compassion, quelque peu de terre. Les Mongols ont insensiblement suivi leur exemple, et abandonné la vie nomade. Ils ont bu leur vin et fumé leur tabac à crédit ; ils ont acheté leur toile. Mais quand le temps est venu de faire les comptes, tout a été fixé au quarante, au cinquante pour cent. Ils ont alors usé de violence, et les Mongols ont été forcés de leur abandonner tout, maisons, terres et troupeaux. — Vous ne pouvez donc pas demander justice aux tribunaux ? — Justice aux tribunaux ! oh, c’est impossible ; les Kitat savent parler et mentir. Il est impossible qu’un Mongol gagne un procès contre un Kitat… Seigneurs Lamas, tout est perdu pour le royaume de Gechekten… À ces mots, le Mongol se leva, nous fit une génuflexion, monta à cheval, et disparut promptement dans le désert.

Nous fîmes encore route pendant deux jours à travers le pays de Gechekten, et partout nous eûmes à remarquer le malaise et la souffrance de ses pauvres habitants. Cependant cette contrée est naturellement d’une richesse étonnante, surtout en mines d’or et d’argent ; mais ces trésors eux-mêmes ont été souvent la cause des plus grandes calamités. Malgré la sévère défense d’exploiter les mines, il arrive quelquefois que les bandits Chinois se réunissent par grandes troupes, et s’en vont les armes à la main fouiller les montagnes. Il existe des hommes qui ont une capacité remarquable pour découvrir des mines d’or ; ils se guident, dit-on, d’après la conformation des montagnes et l’espèce des plantes qu’elles produisent. Il suffit d’un homme doué de ce funeste talent, pour porter la déso-