Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/302

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

est le sens de cela ? — Nous écrivîmes la traduction en thibétain, en tartare et en chinois, et nous la lui fîmes passer. — On ne m'avait pas trompé, nous dit-il ; Vous êtes des hommes d'un grand savoir. Voilà que vous pouvez écrire dans toutes les langues, et vous exprimez des pensées aussi profondes que celles qu'on trouve dans les livres de prières. Puis il répétait, en branlant lentement la tête : Que sert à l'homme de conquérir le monde entier, s'il vient à perdre son âme ?

Pendant que le Régent et les personnages dont il était entouré, s'extasiaient sur notre merveilleuse science, on entendit tout à coup retentir, dans lu cour du palais, les cris de la multitude et le bruit sonore du tamtain chinois. — Voici l'ambassadeur de Péking, nous dit le Régent ; il veut lui-même vous interroger. Dites-lui franchement ce qui vous concerne, et comptez sur ma protection ; c'est moi qui gouverne le pays. Cela dit, il sortit, avec les gens de sa suite, par une petite porte dérobée, et nous laissa seuls au milieu de celle espèce de prétoire.

L'idée de tomber entre les mains des Chinois nous fit d'abord une impression désagréable, et l'image de ces horribles persécutions, qui, à diverses époques, ont désolé les chrétientés de Chine, s'empara tout à coup de notre imagination ; mais nous fûmes bientôt rassurés, en réfléchissant que, seuls et isolés comme nous l'étions au milieu du Thibet, nous ne pouvions compromettre personne. Cette pensée nous donna du courage. — Samdadchiemba, dimes-nous à notre jeune néophyte, c'est maintenant qu'il faut montrer que nous sommes des braves, que nous sommes des chrétiens. Cette affaire ira peut-être loin ; mais ne perdons