Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/401

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de soigner des animaux ; sans se mettre en peine du chauffage et de la nourriture : c'était comme la réalisation d'une brillante utopie. Aussitôt qu'on est descendu de cheval, trouver une chambre bien chaude et une grande cruche de thé beurré, c'était pour nous du pur sybaritisme.

Peu après notre arrivée, nous reçûmes la visite officielle du grand Lama que le Régent avait chargé de nous accompagner jusqu'aux frontières de la Chine, ei avec lequel nous n'avions encore échangé que quelques paroles de politesse, lors du passage de la rivière. Ce personnage nommé Dsiamdchang, c'est-à-dire le Musicien, était un homme trapu, et âgé d'une cinquantaine d'années ; il avait rempli des fonctions administratives dans plusieurs contrées du Thibet. Avant d'être rappelé à Lha-Ssa, il occupait le poste de Dhéba général, dans un canton peu éloigné de Ladak ; une incomparable bonhomie était répandue sur sa figure large et un peu ridée. Son caractère tenait de la naïveté et de la candeur de l'enfant. Il nous dit que le Régent l'avait chargé de faire ce voyage exprès pour nous, afin de veiller à ce que rien ne nous manquât, durant tout le temps que nous serions dans les contrées soumises au Talé-Lama. Ensuite il nous présenta deux jeunes Thibétains, dont il nous fit un long et pompeux éloge. — Ces deux hommes, nous dit-il, ont été spécialement désignés pour vous servir en route. Quand vous leur commanderez quelque chose, ils devront vous obéir ponctuellement. Pour ce qui est de vos repas, ajouta-t-il, comme vous êtes peu accoutumés à la cuisine thibétaine, il a été convenu que vous les prendriez avec le Mandarin chinois.

Après avoir conversé pendant quelques instants avec le