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Au général Hugo.


Ce 17 février [1825].
Mon cher papa,

Tu as vu que nos lettres se sont croisées ; je désire que notre lettre t’ait fait autant de plaisir que la tienne nous en a fait ; elle ne pouvait nous apporter de plus agréable nouvelle que celle de votre prochaine arrivée, et j’espère presque, en t’écrivant celle-ci, qu’elle ne te trouvera pas à Blois.

Tu ne saurais croire quelle fête nous nous faisons de vous présenter notre Léopoldine, toujours petite, mais toujours bien portante et si gentille !… elle vous aimera tous deux comme nous l’aimons : nous ne saurions dire davantage.

Nous nous applaudissons presque d’avoir été une partie du mois sans nouvelles de toi, puisque tu as été malade ; nous aurions eu des inquiétudes ; maintenant nous n’avons que le plaisir de te savoir rétabli.

Adieu, bon et cher papa, je ne t’en écris pas plus long, puisque nous pourrons bientôt communiquer de vive voix. Quelles que soient les affaires qui t’amènent, tu sais que tu peux compter en tout et pour tout sur notre dévoûment comme sur notre tendre et respectueux attachement.

Embrasse pour nous la bonne marraine de ta Léopoldine.

Victor[1].


À Monsieur J.-B. Soulié[2]
hôtel de Hollande, rue Neuve-des-Bons-Enfants, à Paris.


Blois, 27 avril 1825, matin.

Savez-vous, mon bon Soulié, que les grâces royales pleuvent sur moi, au moment où je viens à Blois me faire hermite[3] ? Le roi me nomme chevalier de la légion d’honneur, et me fait l’insigne honneur de m’inviter

  1. Bibliothèque municipale de Blois.
  2. Rédacteur à la Quotidienne, conservateur de la bibliothèque de l’Arsenal.
  3. Victor Hugo était allé, avec sa femme, passer quelque temps chez le général Hugo. Il reçut là cette lettre inédite du vicomte de la Rochefoucauld qui était alors « chargé de tout ce qui concerne les arts dans leurs rapports avec la Maison du Roi ».
    Paris, le 25 avril 1825.
    Je n’ai pu résister au désir de soumettre sans retard au Roi la demande de Monsieur Victor Hugo, et je ne veux point tarder non plus à lui apprendre que S. M. vient, sur ma proposition, de le nommer chevalier de la légion d’honneur. Le Roi y a mis une grâce charmante qui semble doubler le prix d’une faveur si bien méritée, et s’est étonné même de l’oubli dans lequel étaient restés MM. Hugo et de Lamartine. Pour moi, je suis personnellement heureux qu’il m’ait été réservé de réparer une erreur dont les lettres avaient à s’affliger.
    Il recevra incessamment une lettre officielle ; mais je n’ai point voulu perdre un moment pour lui apprendre cette nouvelle qui est pour moi un véritable bonheur.
    Je lui offre mille compliments sincères.
    le vte de la rochefoucauld.