Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome II.djvu/59

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Dans cette situation, en présence de la force brutale qui règne et contre laquelle je renouvelle du fond de mon exil mes protestations indignées, je ne puis prendre part à l’élection académique qui aura lieu le 22 janvier, et je vous prie, Messieurs et chers confrères, d’agréer, avec l’expression de mes regrets, l’assurance de ma vive cordialité et de ma haute considération.

Victor Hugo,
Représentant du peuple[1].


À André Van Hasselt.


16 janvier 1852.

Vous me comblez, monsieur et cher confrère, je dirai même que vous me meublez. Vous m’envoyez un canapé à Bruxelles, à moi qui ne pourrais même pas vous donner un fauteuil à Paris. Je le regrette pour nous autres infortunés quarante. L’Académie française serait un peu moins welche si elle prenait quelques belges comme vous.

Pour le moment, plaignons-la : cette pauvre Académie est toute penaude là-bas. Trois proscrits ! Depuis 1815 elle ne s’était pas vue à pareille fête. Dans ce temps-là c’était Louis XVIII qui chassait l’autre Napoléon, le grand, de l’Académie des Sciences.

Quant à moi, je m’étends voluptueusement sur votre excellent canapé et j’y lis vos bons et beaux livres. Ô ingratitude humaine ! Je commence à regarder avec dédain ma malle, que j’avais élevée à la dignité de sopha et que vous avez destituée. C’est fini ! de Spartiate, je me fais sybarite. Bientôt j’irai me mettre aux pieds de Mme  van Hasselt et vous serrer la main.


À Madame Victor Hugo.


Bruxelles, 17 janvier. Samedi.

Je n’ai qu’une minute, chère bien-aimée femme. Je t’écris par la bonne de Schœlcher, vieille femme qui a du courage comme dix jeunes hommes et qui l’a prouvé. Elle te contera son histoire et te remettra pour moi une lettre d’elle que tu me feras passer par la plus prochaine occasion. Tout

  1. Archives de la famille de Victor Hugo.