Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., En voyage, tome II.djvu/274

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— albums. —
18 octobre.

Chalon-sur-Saône. — Peu de chose d’abord. Cherchez pourtant. Grand’rue. — Maison dite du Jeu de paume. Du quatorzième siècle. Belle façade.

Des ogives sont gracieusement inscrites dans les quadrilatères supérieurs des croisées. Aujourd’hui masure habitée par

des tanneurs. Des cuirs de bœuf pendent aux poutres sous la grande porte.

Cathédrale. — On lui bâtit deux clochers faux-gothique ornés en guise de lucarnes de croix de templiers de Tivoli d’hiver, rue Grenelle-St-Honoré. Bel intérieur des treizième et quatorzième siècles, hideusement badigeonné ici en jaune, là en blanc, là en rose, etc. — Admirable tapisserie du seizième siècle employée à masquer les travaux. Quatre panneaux sur fond bleu fleurdelysé, avec les armes de France au chef. Don royal évident, 1er panneau : Melchissédech, cette mystérieuse figure que la bible ne laisse qu’entrevoir, prêtre et roi, coiffure faite d’un turban, d’une couronne et d’une mitre. Donnant le vin et le pain à Abraham. 2ème panneau : Moïse et la manne pleuvant sur les hébreux. 3ème panneau : l’agneau pascal partagé à tous. 4ème panneau : Jésus donnant la communion aux apôtres tous à genoux autour de la table, excepté Judas qui s’en va sa bourse à la main.

Seule légende répétée partout : Spes mea deus.


Vilain pont Louis XV hérissé d’obélisques. — Au delà un noble pignon du quatorzième siècle. C’est l’Hôpital militaire, hôpital désirable pour les poëtes. Intérieur admirable. La plus belle salle d’hôpital que j’aie vue. — Deux rangées de lits enfermés dans une belle boiserie Louis XIV, luisante comme du bronze et exhaussée sur une marche de bois qui porte pour chaque lit un escabeau frotté et brillant. Grands rideaux blancs de neige. Près de chaque lit une porte qui fait de chaque alcôve une chambrette. Au fond de la nef, la chapelle séparée de la salle par un grand rideau rouge. Entre les deux rangées de lits une rangée de choses meublantes belles et sévères, une grande fontaine-lavoir avec vasque de pierre, un vaste poêle en cuivre, un immense crucifix les deux bras étendus sur les deux rangées de malades. Une ligne de lampes espacées traverse la salle dans le même sens et lie tous ces objets au plafond à poutres saillantes. À la rangée de droite s’adosse