Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Histoire, tome I.djvu/121

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entre la comté de Valois, que en l’évêché de Laon, de Soissons et de Noyon, plus de cent châteaux et de bonnes maisons de chevaliers et écuyers ; et tuoient et roboient quand que ils trouvoient. Mais Dieu par sa grâce y mit tel remède, de quoi on le doit bien regracier. »

On remplaça seulement Dieu par monseigneur le prince-président. C’était bien le moins.

Aujourd’hui, après huit mois écoulés, on sait à quoi s’en tenir sur cette « Jacquerie » ; les faits ont fini par arriver au jour. Et où ? Comment ? Devant les tribunaux mêmes de M. Bonaparte. Les sous-préfets dont les femmes avaient été violées n’avaient jamais été mariés ; les curés qui avaient été rôtis vifs et dont les jacques avaient mangé le cœur ont écrit qu’ils se portaient bien ; les gendarmes autour des cadavres desquels on avait dansé sont venus déposer devant les conseils de guerre ; les caisses publiques pillées se sont retrouvées intactes entre les mains de M. Bonaparte qui les a « sauvées » ; le fameux déficit de cinq mille francs de Clamecy s’est réduit à deux cents francs dépensés en bons de pain. — Une publication officielle avait dit le 8 décembre : « Le curé, le maire et le sous-préfet de Joigny et plusieurs gendarmes ont été lâchement massacrés. » Quelqu’un a répondu dans une lettre rendue publique : « Pas une goutte de sang n’a été répandue à Joigny ; la vie de personne n’y a été menacée. » Qui a écrit cette lettre ? Ce même maire de Joigny, lâchement massacré. M. Henri de Lacretelle, auquel une bande armée avait extorqué deux mille francs dans son château de Cormatin, est encore stupéfait à cette heure, non de l’extorsion, mais de l’invention. M. de Lamartine, qu’une autre bande avait voulu saccager et probablement mettre à la lanterne, et dont le château de Saint-Point avait été incendié, et qui « avait écrit pour réclamer le secours du « gouvernement », a appris la chose par les journaux.

La pièce suivante a été produite devant le conseil de guerre de la Nièvre, présidé par l’ex-colonel Martimprey :

ORDRE DU COMITÉ

« La probité est une vertu des républicains.

« Tout voleur ou pillard sera fusillé.

« Tout détenteur d’armes qui, dans les douze heures, ne les aura pas déposées à la mairie ou qui ne les aura pas rendues, sera arrêté et détenu jusqu’à nouvel ordre. « Tout citoyen ivre sera désarmé et emprisonné.

« Clamecy, 7 décembre 1851.

« Vive la République sociale !

« Le Comité révolutionnaire social. »