Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome I.djvu/748

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Pareil au noir nuage où serpente la foudre,

Volent avec les vents !


Ils vont. Dans les vallons comme un orage ils passent,
Comme ces ouragans qui dans les monts s’entassent,

Comme un globe de feu ;

Puis déjà ne sont plus qu’un point noir dans la brume,
Puis s’effacent dans l’air comme un flocon d’écume

Au vaste océan bleu.


Ils vont. L’espace est grand. Dans le désert immense,
Dans l’horizon sans fin qui toujours recommence,

Ils se plongent tous deux.

Leur course comme un vol les emporte, et grands chênes,
Villes et tours, monts noirs liés en longues chaînes,

Tout chancelle autour d’eux.


Et si l’infortuné, dont la tête se brise,
Se débat, le cheval, qui devance la brise,

D’un bond plus effrayé,

S’enfonce au désert vaste, aride, infranchissable,
Qui devant eux s’étend, avec ses plis de sable,

Comme un manteau rayé.


Tout vacille et se peint de couleurs inconnues :
Il voit courir les bois, courir les larges nues,

Le vieux donjon détruit,

Les monts dont un rayon baigne les intervalles ;
Il voit ; et des troupeaux de fumantes cavales

Le suivent à grand bruit.


Et le ciel, où déjà les pas du soir s’allongent,
Avec ses océans de nuages où plongent

Des nuages encor,

Et son soleil qui fend leurs vagues de sa proue,
Sur son front ébloui tourne comme une roue

De marbre aux veines d’or.