Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome II.djvu/296

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D’amour et d’harmonie et d’extase écumants.
Alors, non-seulement ce qui sur leur surface
Reste du Verbe saint que chaque jour efface,
Mais tout ce que grava dans leur bronze souillé
Le passant imbécile avec son clou rouillé,
L’ironie et l’affront, les mots qui perdent l’âme,
La couronne tronquée et devenue infâme,
Tout puisant vie et source en leurs vibrations,
Tout se transfigurant dans leurs commotions,
Mêlera, sans troubler l’ensemble séraphique,
Un chant plaintif et tendre à leur voix magnifique !
Oui, le blasphême inscrit sur le divin métal
Dans ce concert sacré perdra son cri fatal ;
Chaque mot qui renie et chaque mot qui doute
Dans ce torrent d’amour exprimera sa goutte ;
Et, pour faire éclater l’hymne pur et serein,
Rien ne sera souillure et tout sera l’airain !


                          VI

Oh ! c’est un beau triomphe à votre loi sublime,
Seigneur, pour vos regards dont le feu nous ranime
C’est un spectacle auguste, ineffable et bien doux
A l’homme comme à l’ange, à l’ange comme à vous,
Qu’une chose en passant par l’impie avilie,
Qui, dès que votre esprit la touche, se délie,
Et sans même songer à son indigne affront,
Chante, l’amour au cœur et le blasphême au front !
Voilà sur quelle pente, en ruisseaux divisée,
S’écoulait flots à flots l’onde de sa pensée,
Grossie à chaque instant par des sanglots du cœur.