Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome II.djvu/411

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Au lit du vieillard solitaire
Elle penche un front gracieux,
Et rien n’est plus beau sur la terre,
Et rien n’est plus grand sous les cieux

Lorsque, réchauffant leurs poitrines
Entre ses genoux triomphants,
Elle tient dans ses mains divines
Les pieds nus des petits enfants !

Elle va dans chaque masure,
Laissant au pauvre réjoui
Le vin, le pain frais, l’huile pure,
Et le courage épanoui !

Et le feu ! le beau feu folâtre,
A la pourpre ardente pareil,
Qui fait qu’amené devant l’âtre
L’aveugle croit rire au soleil !

Puis elle cherche au coin des bornes,
Transis par la froide vapeur,
Ces enfants qu’on voit nus et mornes
Et se mourant avec stupeur.

Oh ! voilà surtout ceux qu’elle aime !
Faibles fronts dans l’ombre engloutis,
Parés d’un triple diadème,
Innocents, pauvres et petits !

Ils sont meilleurs que nous ne sommes !
Elle leur donne, en même temps,
Avec le pain qu’il faut aux hommes,
Le baiser qu’il faut aux enfants !

Tandis que leur faim secourue
Mange ce pain de pleurs noyé,