Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome II.djvu/412

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Elle étend sur eux dans la rue
Son bras de passants coudoyé.

Et si, le front dans la lumière,
Un riche passe en ce moment,
Par le bord de sa robe altière
Elle le tire doucement !

Puis pour eux elle prie encore
La grande foule au cœur étroit,
La foule qui, dès qu’on l’implore,
S’en va comme l’eau qui décroît.

« Oh ! malheureux celui qui chante
Un chant joyeux, peut-être impur,
Pendant que la bise méchante
Mord un pauvre enfant sous son mur !

« Oh ! la chose triste et fatale,
Lorsque chez le riche hautain
Un grand feu tremble dans la salle,
Reflété par un grand festin,

« De voir, quand l’orgie enrouée
Dans la pourpre s’égaie et rit,
À peine une toile trouée
Sur les membres de Jésus-Christ !

« Oh ! donnez-moi pour que je donne !
J’ai des oiseaux nus dans mon nid.
Donnez, méchants, Dieu vous pardonne !
Donnez, ô bons, Dieu vous bénit !

« Heureux ceux que mon zèle enflamme !
Qui donne aux pauvres prête à Dieu !
Le bien qu’on fait parfume l’âme ;
On s’en souvient toujours un peu !