Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XIII.djvu/173

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Les champs et les vallons sont des choses calmées.
Vois ces grottes où rit l'ondine aux mains palmées,
Vois ces halliers qu'un dieu mystérieux bénit;
La branche n'a qu'un but, c'est de cacher un nid;
C'est l'amour qui ravit les rossignols, doux chantres;
Les poursuites" d'amants-aboutissent aux antres;
La nature n'est qu'une alcôve; et c'est Vénus
Dont on distingue au fond de l'ombre les seins nus;
Janvier part, floréal accourt; le dialogue
De l'hiver qui bougonne avec la vive églogue
Tourne en querelle, et l'air est plein d'un vague chant
Qui fait que la beauté n'a point le coeur méchant.
Les arbres ont besoin, belles, de-votre rire;
Une joie espiègle est mêlée au zéphyre;
La pomme d'Eve aux mains de Galatée atteint
Virgile; et tout serait manqué, maussade, éteint,
Si Chloé, que les nids couvrent de gais murmures,
Ne barbouillait le vieux Silène avec des mûres;
Et, si Phyllis entre eux n'était comme un démon,
Ménalque ne saurait que dire à Palémon.
-Aime, et baigne en chantant tes pieds nus dans la source;
Les rires étouffés, belle, sont la ressource
Des taillis ténébreux et des coeurs palpitants.
O profondeur sauvage et fraîche du printemps!
On entend alterner des flûtes sous les chênes.
Quel est -le maître? Éros. Et quelles sont les chaînes?
Les rayons, les parfums, lés soupirs, les chansons,
Et l'entrelacement des fleurs dans les buissons.
Cette nature au flanc sacré n'est pas contente
Si vous êtes "chez elle et que rien ne vous tente.
Belle, vois cette idylle immense, l'horizon;
Vois la-fougère et l'herbe et ses bancs de gazon;
Crois-tu que de cette ombre; et de ce. paysage
Il sorte le conseil insensé d'être sage;;
D'être froid; de ne point s'approcher de trop près,
D'être sourd aux instincts, d'être aveugle aux attraits,
De refuser d'entrer dans l'amour, douce école,